Une journée au Spital
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English version here
Non, je ne suis ni malade, ni blessé… le Spital où j'ai passé mon dimanche est un sommet herbeux qui s'élève à une altitude de 1574 mètres, au sud d'Einsiedeln dans le canton de Schwyz. Par un jour de mi-novembre où les stratus recouvrent les vallées de la Suisse centrale d'une chape grise, froide et humide, ce petit sommet semble être un bon choix pour une randonnée : il me permettra de retrouver le soleil sans devoir aller trop haut ni dépenser trop d'énergie.
Le train quitte la grisaille juste après Arth-Goldau mais, à ma grande déception, le ciel n'est pas du bleu profond espéré : une mince couche de nuages d'altitude masque quelque peu le soleil, dont il ne reste qu'une pâle lumière hivernale qui ne parvient pas à donner de la couleur aux marais et aux collines entre Rothenthurm et Biberbrugg.
Il fait froid et, à dix heures et demie, la petite ville d'Einsiedeln est endormie et un peu tristounette. Sa rue principale est une enfilade de restaurants et d'hôtels fermés depuis longtemps, et de petits magasins d'un style désuet qu'on ne voit que dans les petites villes endormies. Mais au bout de la rue Einsiedeln se réveille brusquement : les cafés et restaurants de la place principale sont animés, dominés qu'ils sont par la principale attraction de la ville, son imposant monastère baroque avec ses deux tours, ses toits pentus et ses boutiques de souvenirs. Nous traversons une partie de l'enceinte du Kloster : une première cour puis une deuxième bordée d'écuries, dont le mur est bizarrement décoré d'une immense publicité pour une compagnie d'assurance.
Une piste caillouteuse nous fait prendre de l'altitude au-dessus des toits et des pignons du monastère. Au fond, un tremplin de ski ajoute une touche un peu plus moderne et sportif à ce paysage paisible. La piste nous amène en peu de temps au Friherrenberg, petite colline boisée qui domine la ville. Quittant la forêt, la vue s'ouvre maintenant vers le sud et vers les montagnes enneigées, alors qu'à nos pieds, les eaux vertes du Sihlsee s'étendent tranquillement. C'est un beau paysage, même s'il est dommage que le soleil n'a pas suffisamment de force pour ajouter plus de couleur.
Nous descendons jusqu'au village de Gross (qui est minuscule), franchissons le Grossbach sur un pont tout neuf, puis traversons une cour dont le propriétaire est visiblement un grand fan non seulement de nains de jardin, mais aussi de Bouddha. C'est ici que commence la plus grosse montée de la journée, quelque 350 mètres de dénivelée pour gagner la crête de Hummel. La montée nous réchauffe bien ; pourtant, il doit faire froid, car le sentier est gelé par endroits. Une demi-heure de zigzags en forêt nous amène enfin jusqu'au début de la crête, large et herbeuse, parfois aussi marécageuse. Nous passons à la ferme d'Unter Hummel, franchissons une bosse coiffée d'une croix (chaque petite éminence ici a sa croix en bois) et continuons vers le sud, toujours plus haut mais moins raide à présent. La crête devient momentanément plus étroite, puis le sentier remonte le flanc ouest d'une nouvelle bosse. A partir d'ici il y a de la neige ; sous la neige, de la gadoue : l'endroit ne s'appelle pas Mösliwald pour rien ! Une dernière grimpée sur une pente toute recouverte de neige dure (sauf aux endroits où on s'enfonce jusqu'à mi-mollet sans s'y attendre…) et nous voici à l'alpage isolé de Bögliegg, avec le sommet du Spital juste devant nous. Nous y arrivons à deux heures pile, après trois heures et demie de marche depuis la gare.
La vue depuis le sommet est superbe dans toutes les directions, et le soleil a enfin réussi à faire pénétrer un peu de couleur et de chaleur dans le paysage. Vers le sud et le sud-est, ce sont le Druesberg et les sommets entre Sihltal et Wägital qui dominent. Plus à l'ouest, voici les Mythen omniprésents et la pyramide du Rigi-Kulm, alors que loin là-bas, tout à l'est, le Säntis enneigé s'élève au-dessus des collines du Toggenburg.
Nous redescendons au chalet de Bögliegg, où nous avons repéré un banc parfaitement orienté face à la vue et au soleil qui baisse déjà dans le ciel. Ma coéquipière a fait de la soupe, moi j'ai fait une salade saumon-ciboulette-coquillettes. Elle a amené du saucisson espagnol, moi du chocolat suisse (quoique fabriqué en France selon l'emballage…) Le soleil nous réchauffe, il n'y a pas un poil de vent… que la vie est dure quand on est au Spital !
A trois heures, nous repartons. Le soleil descend vers l'horizon, il fera nuit avant que nous arrivions à la gare. Dès que nous nous trouvons à l'ombre, il commence à faire froid. Pour la première fois depuis février, gants et bonnets de laine retrouvent la lumière du jour après un été au fond du sac à dos. Nous passons une nouvelle bosse coiffée d'une croix, puis plongeons vers la vallée de Grosser Runs, prenant un raccourci improvisé à un endroit après avoir perdu le balisage. Arrivés au fond de la vallée, nous continuons le long d'une petite route, passant devant des hameaux où des enfants jouent encore dehors, profitant du peu de lumière du jour qui reste encore. Vers l'est, les derniers rayons du soleil couchant touchent la cime d'une montagne enneigée. La route contourne le Friherrenberg par l'ouest, puis descend vers Einsiedeln. Un chemin le long de la rivière nous amène enfin à la gare vers cinq heures et quart, alors que la nuit tombe pour de bon. Cette belle journée a été un bonus ; ce n'est pas tous les ans qu'on peut pique-niquer au soleil à 1600 mètres à la mi-novembre. Y aura-t-il d'autres journée du même style avant l'arrivée définitive de l'hiver… qui sait ?
Non, je ne suis ni malade, ni blessé… le Spital où j'ai passé mon dimanche est un sommet herbeux qui s'élève à une altitude de 1574 mètres, au sud d'Einsiedeln dans le canton de Schwyz. Par un jour de mi-novembre où les stratus recouvrent les vallées de la Suisse centrale d'une chape grise, froide et humide, ce petit sommet semble être un bon choix pour une randonnée : il me permettra de retrouver le soleil sans devoir aller trop haut ni dépenser trop d'énergie.
Le train quitte la grisaille juste après Arth-Goldau mais, à ma grande déception, le ciel n'est pas du bleu profond espéré : une mince couche de nuages d'altitude masque quelque peu le soleil, dont il ne reste qu'une pâle lumière hivernale qui ne parvient pas à donner de la couleur aux marais et aux collines entre Rothenthurm et Biberbrugg.
Il fait froid et, à dix heures et demie, la petite ville d'Einsiedeln est endormie et un peu tristounette. Sa rue principale est une enfilade de restaurants et d'hôtels fermés depuis longtemps, et de petits magasins d'un style désuet qu'on ne voit que dans les petites villes endormies. Mais au bout de la rue Einsiedeln se réveille brusquement : les cafés et restaurants de la place principale sont animés, dominés qu'ils sont par la principale attraction de la ville, son imposant monastère baroque avec ses deux tours, ses toits pentus et ses boutiques de souvenirs. Nous traversons une partie de l'enceinte du Kloster : une première cour puis une deuxième bordée d'écuries, dont le mur est bizarrement décoré d'une immense publicité pour une compagnie d'assurance.
Une piste caillouteuse nous fait prendre de l'altitude au-dessus des toits et des pignons du monastère. Au fond, un tremplin de ski ajoute une touche un peu plus moderne et sportif à ce paysage paisible. La piste nous amène en peu de temps au Friherrenberg, petite colline boisée qui domine la ville. Quittant la forêt, la vue s'ouvre maintenant vers le sud et vers les montagnes enneigées, alors qu'à nos pieds, les eaux vertes du Sihlsee s'étendent tranquillement. C'est un beau paysage, même s'il est dommage que le soleil n'a pas suffisamment de force pour ajouter plus de couleur.
Nous descendons jusqu'au village de Gross (qui est minuscule), franchissons le Grossbach sur un pont tout neuf, puis traversons une cour dont le propriétaire est visiblement un grand fan non seulement de nains de jardin, mais aussi de Bouddha. C'est ici que commence la plus grosse montée de la journée, quelque 350 mètres de dénivelée pour gagner la crête de Hummel. La montée nous réchauffe bien ; pourtant, il doit faire froid, car le sentier est gelé par endroits. Une demi-heure de zigzags en forêt nous amène enfin jusqu'au début de la crête, large et herbeuse, parfois aussi marécageuse. Nous passons à la ferme d'Unter Hummel, franchissons une bosse coiffée d'une croix (chaque petite éminence ici a sa croix en bois) et continuons vers le sud, toujours plus haut mais moins raide à présent. La crête devient momentanément plus étroite, puis le sentier remonte le flanc ouest d'une nouvelle bosse. A partir d'ici il y a de la neige ; sous la neige, de la gadoue : l'endroit ne s'appelle pas Mösliwald pour rien ! Une dernière grimpée sur une pente toute recouverte de neige dure (sauf aux endroits où on s'enfonce jusqu'à mi-mollet sans s'y attendre…) et nous voici à l'alpage isolé de Bögliegg, avec le sommet du Spital juste devant nous. Nous y arrivons à deux heures pile, après trois heures et demie de marche depuis la gare.
La vue depuis le sommet est superbe dans toutes les directions, et le soleil a enfin réussi à faire pénétrer un peu de couleur et de chaleur dans le paysage. Vers le sud et le sud-est, ce sont le Druesberg et les sommets entre Sihltal et Wägital qui dominent. Plus à l'ouest, voici les Mythen omniprésents et la pyramide du Rigi-Kulm, alors que loin là-bas, tout à l'est, le Säntis enneigé s'élève au-dessus des collines du Toggenburg.
Nous redescendons au chalet de Bögliegg, où nous avons repéré un banc parfaitement orienté face à la vue et au soleil qui baisse déjà dans le ciel. Ma coéquipière a fait de la soupe, moi j'ai fait une salade saumon-ciboulette-coquillettes. Elle a amené du saucisson espagnol, moi du chocolat suisse (quoique fabriqué en France selon l'emballage…) Le soleil nous réchauffe, il n'y a pas un poil de vent… que la vie est dure quand on est au Spital !
A trois heures, nous repartons. Le soleil descend vers l'horizon, il fera nuit avant que nous arrivions à la gare. Dès que nous nous trouvons à l'ombre, il commence à faire froid. Pour la première fois depuis février, gants et bonnets de laine retrouvent la lumière du jour après un été au fond du sac à dos. Nous passons une nouvelle bosse coiffée d'une croix, puis plongeons vers la vallée de Grosser Runs, prenant un raccourci improvisé à un endroit après avoir perdu le balisage. Arrivés au fond de la vallée, nous continuons le long d'une petite route, passant devant des hameaux où des enfants jouent encore dehors, profitant du peu de lumière du jour qui reste encore. Vers l'est, les derniers rayons du soleil couchant touchent la cime d'une montagne enneigée. La route contourne le Friherrenberg par l'ouest, puis descend vers Einsiedeln. Un chemin le long de la rivière nous amène enfin à la gare vers cinq heures et quart, alors que la nuit tombe pour de bon. Cette belle journée a été un bonus ; ce n'est pas tous les ans qu'on peut pique-niquer au soleil à 1600 mètres à la mi-novembre. Y aura-t-il d'autres journée du même style avant l'arrivée définitive de l'hiver… qui sait ?
Tourengänger:
stephen
Communities: Randonneur
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