A short walk on the GTA : de Molini à Macugnaga par le Val Strona et le Val Sesia
La GTA / Grande Traversata delle Alpi traverse toute les Alpes piémontaises de la frontière suisse jusqu'à la Méditerranée. Cousine du GR5 français Léman-Méditerranée, elle emprunte souvent des sentiers sauvages, pas toujours aisés à repérer, et infiniment moins roulants que d'autres itinéraires classiques comme la Via Alpina Suisse ou le Tour du Mont Blanc.
4 jours de liberté sur le Pont de la Fête-Dieu dans le Canton de Fribourg (vive les fériés catholiques !) m'avaient donné envie de découvrir les mystérieuses (pour moi) Val Strona et Val Sesia, les 2 dernières vallées au sud de l'Ossola, quasiment inaccessibles depuis la Suisse en TP. J'ai donc opté pour un parcours accéléré en suivant la GTA pour relier successivement l'entrée du Val Anzasca (Molini) au Val Strona (Campello Monti) puis au Val Sesia (Alagna).
En l'absence de TP depuis Alagna, j'ai dû quitter la GTA le dernier jour pour revenir sur Macugnaga d'où un (unique !) bus en fin d'après-midi permet de rentrer sur Domodossola puis Berne. J'ai en gros doublé les étapes usuelles, mais je n'ose même plus appeler ça de la rando-trail tant il est quasiment impossible à un pratiquant lamba comme moi de courir quoique que ce soit sur ce type de sentier exigeant une attention constante pour préserver l'intégrité de ses chevilles !
Remarques générales :
- j'avais envie de découvrir la GTA après en avoir souvent lu les louanges dans les revues germaniques, du coup j'imaginais un itinéraire classique, fréquenté et évident...de ce point de vue la c'est raté ! Pour ce qui est de la splendeur, de la solitude et de la sauvagerie par contre rien à redire...
- la Valsesia s'est autoproclamée "vallée la plus verte d'Italie"...l'herbe a du coup une fâcheuse propension à recouvrir les sentiers, surtout sous les 1800m ! 95% des randonneurs effectuent des aller-retours depuis les parkings, certaines portions sont raisonnablement commodes mais celles de pure traversée se déroulent souvent sur des chemins étroits, peu marqués et à la végétation envahissante. J'ai tourné à 3-5 tiques par jour (plus toutes celles que je n'ai pas encore repérées...), ce qui ne m'arrive jamais en Suisse ! Total supérieur à 12, plus que dans mes 58 ans passés ...Mais avec la canicule impossible de rester en pantalon long.
- par contre le balisage est abondant et on trouve de l'eau partout. Il faut juste ne pas se fier aux temps indiqués, incohérents d'un panneau à l'autre (d'autant qu'il y a les vieux panneaux jaunes, les nouveaux rouges et blanc, etc...) et souvent assez fantaisistes (comprendre : bien trop optimistes !). En tous cas j'étasi bien incapable de diviser les temps indiqués par 2 comme en Suisse. Les sections en forêt sont souvent plus faciles mais celle-ci s'arrête curieusement assez bas, vers 1800m.
- la vaste majorité des chalets d'alpage sont en ruine. Des siècles de compissage et de conchiage bovin font qu'ils sont souvent envahis de buissons et d'orties et d'herbes folles. Donc au lieu de se réjouir comme chez nous devant la perspective d'une belle pause assis dans l'herbe ou sur un banc, leur présence est plutôt la promesse de quelques piqures ou éraflures supplémentaires.
- bref les coureurs pressés feront mieux de se rabattre sur l'(U)TMB, le GR5 ou les bons sentiers valaisans ! Certes en vieillissant je n'ai plus le pied très sûr, mais je commence aussi à comprendre pourquoi les Italiens ont moins la culture de la rando que les peuplades au nord des Alpes...
Météo : de plus en plus chaud au fil des jours, avec heureusement des cumulus jeudi et dimanche donnant parfois un peu d'ombre. 33° en plaine, isotherme du 0° à 4500...bref des conditions invitant plus à la baignade qu'à la marche en montagne. Mais quand on n'aime pas l'eau...je me consolais en pensant aux amis bloqués en plaine avec 10 degrés de plus ! Même en lavant mes vêtements tous les soirs je puais parfois tellement que je m'incommodais moi-même.
Accès : jeudi train de 7h34 à Berne --> Domodossola --> car pour Macugnaga, descente à l'arrêt Molini 9h58. Dimanche car de 16h33 à Macugnaga --> Domodossola (pause glande et glace) --> train de 18h47 --> Brig --> Berne 20h24.
Au fil des jours :
Jeudi 16/06, Molini - Campello Monti : 18.5k, +1900m, -1150m, 5h15 net.
(horaire officiel du topo GTA : 9h30)
Molini
Départ peu après 10h, le balisage présent dès le village donne l'illusion d'une étape facile, il n'en sera rien...le chemin passe la rivière à la quote 450m avant de remonter le bord du torrent Segnara. Il serpente assez vite sous un océan de végétation avant de réapparaitre nettement pour remonter une longue épaule forestière d'où on rejoint le refuge-bivouac Pirozzini all'Alpe del Lago (1550m, ouvert, 8 places avec couvertures et gazinière, 2h30 jusque là).
Un sentier...discret !
Arrivée au 1er Bivacco (Alpe del Lago)
La suite est bien plus pimentée : le chemin a quasiment disparu, il faut s'orienter à travers les rhodos et l'herbe haute en repérant les marques de peinture et les quelques cairns (carto GPS plus que recommandée...). En me tordant méchamment le pied sur un caillou planqué, je réalise que le portable ne passe pas, que je risque bien de ne voir personne de la journée au vu du nombre de toiles d'araignées traversées, et que je ferais donc bien de faire gaffe. J'abandonne toute vélléité de rythme, il me faudra près de 2h pour les 4 ou 5 km séparant ce 1er bivacco du second (Pian del Lago, ouvert, 4 places avec couvertures et gazinière).
Entre les 2 bivouacs...qui a vu le cairn ?
On retrouve ensuite (par moments...) un semblant de sente jusqu'au Lago di Ravinella - puis un vrai chemin jusqu'au col d'Usciolo (2040m). La descente coté Val Strona est bien plus fréquentable, le berger et son patou seront les 2 premières personnes croisées de la journée juste avant l'arrivée à Carcoforo.
Carcoforo
Superbe accueil d'Elvira à l'Albergo Nigritella, avec un diner pantagruélique à 4 plats, un petit-déjeuner préparé d'avance pour partir à l'aube, le tout pour 55 € en 1/2 pension. Une adresse en or !
Le 1er d'une longue série !
Soirée sympa avec la femme de Giancarlo Zucchi, l'auteur du magnifique topo de ski de l'Ossola. Elle m'apprend qu'un Allemand est arrivé à moitié mort l'an passé après s'être justement perdu sur cette section, Elvira avait dû donner l'alerte pour le perfuser...Bref une sauvagerie radicale même au standard GTA - l'autre client présent ce soir là hésite du coup à partir comme prévu vers Molini...mais c'est un Valsesian habitué à ce genre de terrain, d'ailleurs je le reverrai 3 jours plus tard dans la descente sur Macugnaga.
Détails trace GPX ici
Vendredi 17/06, Campello Monti - Carcoforo : 29.5k, +2250m, -2250m, 7h15 net.
(horaire officiel du topo GTA : 12h30)
Réveil à 5h30 et départ à 6h, de toutes manières (comme tous les jours...) quasiment impossible d'avaler quoique ce soit après le diner de la veille. Le 1er des 3 cols de la journée (Bochetta di Rimella ou di Campello selon les cartes) est encore assez roulant au standard GTA et je parviens en moins de 2h au magnifique village Walser de Rimella, juste à point pour l'ouverture de l'auberge Fontana (c'est vite trouvé, c'est la seule !)...
San Gottardo, juste au dessus de Rimella
Il me faudra ensuite 1h40 jusqu'à Fobello par un 2eme col facile et bien aménagé. L'Osteria est fermée le matin et la journée trop chaude pour attendre, à fortiori sur la portion de route surchauffée qui s'en suit : j'attaque donc sans attendre le 3ème et dernier col (Egua, 2250m), j'aurai l'occasion de regretter le goudron dans la descente finale cassante à souhait sur Carcoforo ! Pause bienvenue à mi-parcours au Rifugio Barranca où la gardienne se lamente de la faible fréquentation ("faites-moi de la pub chez vous en Suisse !"), la fin du col est en caillasse chaotique, ça change des herbes folles...J'ai tenté de trotter un peu à la descente, mais quand même mis plus d'1h10 pour moins de 950m, difficile d'aller plus vite avec un pied tordu la veille. On passe devant le Rifugio Buffalora mais il est fermé en semaine.
Villa Lancia, sous le Col d'Egua
Carcoforo est un autre superbe village Walser avec un snack servant des miacce (sorte de crèpe-galette) et surtout le délicieux Posto Tappa de l'Alpenrose tenu par 2 jeunes locaux très sympas (65 € MP en chambre individuelle, sinon 55 €). Diner encore plus roboratif que la veille. J'ai bien sûr mis un point d'honneur à finir la casserole entière de polenta au fromage, d'où une nuit agitée malgré la fatigue de la longue étape. J'ai croisé au total une dizaine de randonneurs en 30km, il est vrai que la Fête Dieu est travaillée en Italie - mais quand on voit le monde en Suisse même en pleine semaine, la GTA est vraiment à recommander à tous les agoraphobes !
Carcoforo
Détails trace GPX ici
Samedi 18/06, Carcoforo - Alagna : 20.5k, +1900m, -2000m, 6h net.
(horaire officiel du topo GTA : 10h)
Départ 6h pour tenter d'échapper au sauna, encore raté, le soleil tape très tôt sur ce versant est et j'arrive en nage à 7h40 au 1er col (Colle del Termo) à 2350m ! Le sentier de montée est caillouteux mais aisé à suivre. La descente est tout à l'ombre à cette heure là, un vrai bonheur : d'abord une sente minuscule dans l'herbe haute sur la moitié supérieure, puis un magnifique chemin moelleux en forêt sur le reste, avec un gradient idéal doux...cette descente finale est sans doute la portion la plus roulante (pour ne pas dire la seule...) des 4 jours, j'y croiserai d'ailleurs uniquement des traileurs !
Le Tagliaferro (2964m)
J'arrive à Rima vers 9h, bingo, le seul bar vient de recevoir des viennoiseries toutes chaudes...je me retiens pour en laisser aux autres...Rima fait partie de ces villages Walser magnifiques du Val Sesia, avec ses maisons typiques dont le 1er étage est en pierre et le second en bois. Les vastes balcons entourés de poutres permettaient le séchage du foin - une technique que l'on retrouve aussi dans le Queyras.
Rima
S'ensuit une montée tranquille et torride en 1h35 au Colle del Mud 2325m, j'ai étonnamment de bonnes jambes ce matin (comme quoi 1kg de polenta ça recharge bien les batteries). C'est la grande foule du samedi, je croiserai près de 10 personnes en 1000m de montée, sympas et bavards comme seuls savent l'être les randonneurs italiens. Ils font presque tous l'aller-retour au col et ont un peu de mal à comprendre comment j'ai pu venir de Berne en TP pour finir à Macugnaga avant de rentrer chez moi. Grâce à cette grosse fréquentation le sentier est assez correct dans l'ensemble...ce qui n'est hélas pas le cas de la descente sur Alagna : je n'y croiserai que 2 familles en 1200m (parents indignes !), le chemin est à nouveau assez destroy, envahi à pas mal d'endroits par les hautes herbes. 5 tiques de plus au compteur le soir. Un peu ras le bol, j'avoue. Je mettrai près d'1h30 pour descendre moins de 1200m, soit pas beaucoup moins que les panneaux...
Montée au Col di Mud : Alpe Vorco (2075m)
Dans la descente du Mud. Qui a vu la balise ?
J'arrive vers 12h45 à Alagna, ce gros village touristique est assez chouette mais plutôt calme et pas bien grand, j'ai l'impression que cela vit surtout du free-ride en hiver (les remontées culminent à 3200m et donnent un accès commode à tous les 4000 faciles du sud du Mont Rose). Pour le reste plein de magnifiques demeures Walser mais peu de boutiques, peu de restos, peu d'hôtels...rien à voir avec Zermatt ou Grindelwald ! Pour finir y'a pas que les glaciers de montagne qui disparaissent, ceux qui servent des glaces semblent également mal en point, je n'en trouverai qu'un seul - et encore bien caché !
Alagna
Détails trace GPX ici
Dimanche 19/06, Alagna - Macugnaga : 26.5k, +1800m, -1670m, 6h net.
Grasse matinée puisqu'il est inutile d'arriver trop tôt à Macugnaga avec le seul bus de la journée à 16h30. Donc départ tranquille à 6h45, je suis un court moment un couple de trailers locaux adorables mais un peu rapides pour moi...(bon ils avaient fait les 110km de l'Eigertrail !). L'idée était de bavarder un peu mais comme il n'y avait qu'eux capables de parler j'ai vite lâché l'affaire. D'ailleurs les seules personnes montant au col étaient tous en trail...sont fous ces Italiens...
Le versant sud du Mont Rose. Tout à droite la Punta Marguerita et la fameuse Cresta Signal
Alpe Mittletail, dans la montée au Col del Turlo.
Montée au Colle del Turlo - le grand luxe !
J'ai laissé la GTA filer vers le Val d'Aoste, de fait la montée au Colle del Turlo (2740m) est longue et douce sur une sorte de voie romaine dallée pas désagréable. Je partage la solitude du col avec une marmotte peu farouche visiblement habituée des lieux et des miettes de pique-nique. Le début de la descente est presque roulant jusqu'au Bivacco Lanti à 2125m sur cette belle mulattiera dallée qui trace de grands lacets au milieu des pierriers (les névés usuels de début de saison ont déjà tous disparu). Je croise à nouveau le randonneur aperçu le 1er soir a Campello, qui avait réussi à traverser sur Molini non sans mal...mais bon ils ont l'habitude des chemins qui n'existent que sur la carte ici ! Pas étonnant que les traileurs italiens fassent partie du gratin mondial.
Colle del Turlo (2740m) - light et pourtant pas bien fast :-(
Evidemment il ne fallait pas rêver, la suite est à nouveau bien laborieuse sur un sentier disjoint où n'ont subsisté que les petites pierres saillantes entre lesquelles l'herbe tente de reprendre ses droits. On rejoint le torrent principal vers 1500m, le chemin reste défoncé et tord-pattes jusqu'au bout mais il y a aussi de magnifiques vasques pour se tremper les pieds. Pas mal de promeneurs sont d'ailleurs montés dans ce but en ce dimanche étouffant, on se croirait presque au bord de la Verzasca...Au final je mettrai autant de temps à descendre du col à Macugnaga qu'à y monter depuis Alagna !
Verzasca ? Non, Quarazza !
C'est avec bonheur que je retrouve la piste carrossable (et la grande foule !) au Lago delle Fate, les 3 derniers kms jusqu'à Macugnaga sont rapides et roulants et permettent enfin de lâcher les chevaux et de se prendre pour un trailer. Le village est plutôt calme, une petite épicerie de terroir permet d'acheter un casse-croute gouteux. Là encore le seul glacier est bien caché, peu achalandé, et fermé jusqu'à 15h (tuyau : il y en a en fait un vrai et beau à Pecetto, 1.5km plus haut, juste devant le départ du car !). Je tue le temps au grand cimetière abondamment pourvu en plaques mortuaires de tous les "caduti" sur les sommets du Mont Rose. Ca ne donne plus trop envie de refaire de l'alpinisme.
Le car est à presque à l'heure et assez fréquenté, c'est vrai que 5 € pour 1h20 c'est pas abusif...le train suivant pour Brig est par contre annulé, apparemment le conducteur n'a pas réussi à arriver à temps ! Bah c'est l'occasion d'une autre glace (une belle et grosse, enfin !) sur la Piazza del Mercato de Domodossola avant de rentrer enfin au bercail.
Bilan : une traversée superbe et sauvage mais pas sûr d'avoir envie de marcher 1 mois sur ce genre de sentiers pour suivre la GTA jusqu'à la mer...
Détails trace GPX ici
4 jours de liberté sur le Pont de la Fête-Dieu dans le Canton de Fribourg (vive les fériés catholiques !) m'avaient donné envie de découvrir les mystérieuses (pour moi) Val Strona et Val Sesia, les 2 dernières vallées au sud de l'Ossola, quasiment inaccessibles depuis la Suisse en TP. J'ai donc opté pour un parcours accéléré en suivant la GTA pour relier successivement l'entrée du Val Anzasca (Molini) au Val Strona (Campello Monti) puis au Val Sesia (Alagna).
En l'absence de TP depuis Alagna, j'ai dû quitter la GTA le dernier jour pour revenir sur Macugnaga d'où un (unique !) bus en fin d'après-midi permet de rentrer sur Domodossola puis Berne. J'ai en gros doublé les étapes usuelles, mais je n'ose même plus appeler ça de la rando-trail tant il est quasiment impossible à un pratiquant lamba comme moi de courir quoique que ce soit sur ce type de sentier exigeant une attention constante pour préserver l'intégrité de ses chevilles !
Remarques générales :
- j'avais envie de découvrir la GTA après en avoir souvent lu les louanges dans les revues germaniques, du coup j'imaginais un itinéraire classique, fréquenté et évident...de ce point de vue la c'est raté ! Pour ce qui est de la splendeur, de la solitude et de la sauvagerie par contre rien à redire...
- la Valsesia s'est autoproclamée "vallée la plus verte d'Italie"...l'herbe a du coup une fâcheuse propension à recouvrir les sentiers, surtout sous les 1800m ! 95% des randonneurs effectuent des aller-retours depuis les parkings, certaines portions sont raisonnablement commodes mais celles de pure traversée se déroulent souvent sur des chemins étroits, peu marqués et à la végétation envahissante. J'ai tourné à 3-5 tiques par jour (plus toutes celles que je n'ai pas encore repérées...), ce qui ne m'arrive jamais en Suisse ! Total supérieur à 12, plus que dans mes 58 ans passés ...Mais avec la canicule impossible de rester en pantalon long.
- par contre le balisage est abondant et on trouve de l'eau partout. Il faut juste ne pas se fier aux temps indiqués, incohérents d'un panneau à l'autre (d'autant qu'il y a les vieux panneaux jaunes, les nouveaux rouges et blanc, etc...) et souvent assez fantaisistes (comprendre : bien trop optimistes !). En tous cas j'étasi bien incapable de diviser les temps indiqués par 2 comme en Suisse. Les sections en forêt sont souvent plus faciles mais celle-ci s'arrête curieusement assez bas, vers 1800m.
- la vaste majorité des chalets d'alpage sont en ruine. Des siècles de compissage et de conchiage bovin font qu'ils sont souvent envahis de buissons et d'orties et d'herbes folles. Donc au lieu de se réjouir comme chez nous devant la perspective d'une belle pause assis dans l'herbe ou sur un banc, leur présence est plutôt la promesse de quelques piqures ou éraflures supplémentaires.
- bref les coureurs pressés feront mieux de se rabattre sur l'(U)TMB, le GR5 ou les bons sentiers valaisans ! Certes en vieillissant je n'ai plus le pied très sûr, mais je commence aussi à comprendre pourquoi les Italiens ont moins la culture de la rando que les peuplades au nord des Alpes...
Météo : de plus en plus chaud au fil des jours, avec heureusement des cumulus jeudi et dimanche donnant parfois un peu d'ombre. 33° en plaine, isotherme du 0° à 4500...bref des conditions invitant plus à la baignade qu'à la marche en montagne. Mais quand on n'aime pas l'eau...je me consolais en pensant aux amis bloqués en plaine avec 10 degrés de plus ! Même en lavant mes vêtements tous les soirs je puais parfois tellement que je m'incommodais moi-même.
Accès : jeudi train de 7h34 à Berne --> Domodossola --> car pour Macugnaga, descente à l'arrêt Molini 9h58. Dimanche car de 16h33 à Macugnaga --> Domodossola (pause glande et glace) --> train de 18h47 --> Brig --> Berne 20h24.
Au fil des jours :
Jeudi 16/06, Molini - Campello Monti : 18.5k, +1900m, -1150m, 5h15 net.
(horaire officiel du topo GTA : 9h30)
Molini
Départ peu après 10h, le balisage présent dès le village donne l'illusion d'une étape facile, il n'en sera rien...le chemin passe la rivière à la quote 450m avant de remonter le bord du torrent Segnara. Il serpente assez vite sous un océan de végétation avant de réapparaitre nettement pour remonter une longue épaule forestière d'où on rejoint le refuge-bivouac Pirozzini all'Alpe del Lago (1550m, ouvert, 8 places avec couvertures et gazinière, 2h30 jusque là).
Un sentier...discret !
Arrivée au 1er Bivacco (Alpe del Lago)
La suite est bien plus pimentée : le chemin a quasiment disparu, il faut s'orienter à travers les rhodos et l'herbe haute en repérant les marques de peinture et les quelques cairns (carto GPS plus que recommandée...). En me tordant méchamment le pied sur un caillou planqué, je réalise que le portable ne passe pas, que je risque bien de ne voir personne de la journée au vu du nombre de toiles d'araignées traversées, et que je ferais donc bien de faire gaffe. J'abandonne toute vélléité de rythme, il me faudra près de 2h pour les 4 ou 5 km séparant ce 1er bivacco du second (Pian del Lago, ouvert, 4 places avec couvertures et gazinière).
Entre les 2 bivouacs...qui a vu le cairn ?
On retrouve ensuite (par moments...) un semblant de sente jusqu'au Lago di Ravinella - puis un vrai chemin jusqu'au col d'Usciolo (2040m). La descente coté Val Strona est bien plus fréquentable, le berger et son patou seront les 2 premières personnes croisées de la journée juste avant l'arrivée à Carcoforo.
Carcoforo
Superbe accueil d'Elvira à l'Albergo Nigritella, avec un diner pantagruélique à 4 plats, un petit-déjeuner préparé d'avance pour partir à l'aube, le tout pour 55 € en 1/2 pension. Une adresse en or !
Le 1er d'une longue série !
Soirée sympa avec la femme de Giancarlo Zucchi, l'auteur du magnifique topo de ski de l'Ossola. Elle m'apprend qu'un Allemand est arrivé à moitié mort l'an passé après s'être justement perdu sur cette section, Elvira avait dû donner l'alerte pour le perfuser...Bref une sauvagerie radicale même au standard GTA - l'autre client présent ce soir là hésite du coup à partir comme prévu vers Molini...mais c'est un Valsesian habitué à ce genre de terrain, d'ailleurs je le reverrai 3 jours plus tard dans la descente sur Macugnaga.
Détails trace GPX ici
Vendredi 17/06, Campello Monti - Carcoforo : 29.5k, +2250m, -2250m, 7h15 net.
(horaire officiel du topo GTA : 12h30)
Réveil à 5h30 et départ à 6h, de toutes manières (comme tous les jours...) quasiment impossible d'avaler quoique ce soit après le diner de la veille. Le 1er des 3 cols de la journée (Bochetta di Rimella ou di Campello selon les cartes) est encore assez roulant au standard GTA et je parviens en moins de 2h au magnifique village Walser de Rimella, juste à point pour l'ouverture de l'auberge Fontana (c'est vite trouvé, c'est la seule !)...
San Gottardo, juste au dessus de Rimella
Il me faudra ensuite 1h40 jusqu'à Fobello par un 2eme col facile et bien aménagé. L'Osteria est fermée le matin et la journée trop chaude pour attendre, à fortiori sur la portion de route surchauffée qui s'en suit : j'attaque donc sans attendre le 3ème et dernier col (Egua, 2250m), j'aurai l'occasion de regretter le goudron dans la descente finale cassante à souhait sur Carcoforo ! Pause bienvenue à mi-parcours au Rifugio Barranca où la gardienne se lamente de la faible fréquentation ("faites-moi de la pub chez vous en Suisse !"), la fin du col est en caillasse chaotique, ça change des herbes folles...J'ai tenté de trotter un peu à la descente, mais quand même mis plus d'1h10 pour moins de 950m, difficile d'aller plus vite avec un pied tordu la veille. On passe devant le Rifugio Buffalora mais il est fermé en semaine.
Villa Lancia, sous le Col d'Egua
Carcoforo est un autre superbe village Walser avec un snack servant des miacce (sorte de crèpe-galette) et surtout le délicieux Posto Tappa de l'Alpenrose tenu par 2 jeunes locaux très sympas (65 € MP en chambre individuelle, sinon 55 €). Diner encore plus roboratif que la veille. J'ai bien sûr mis un point d'honneur à finir la casserole entière de polenta au fromage, d'où une nuit agitée malgré la fatigue de la longue étape. J'ai croisé au total une dizaine de randonneurs en 30km, il est vrai que la Fête Dieu est travaillée en Italie - mais quand on voit le monde en Suisse même en pleine semaine, la GTA est vraiment à recommander à tous les agoraphobes !
Carcoforo
Détails trace GPX ici
Samedi 18/06, Carcoforo - Alagna : 20.5k, +1900m, -2000m, 6h net.
(horaire officiel du topo GTA : 10h)
Départ 6h pour tenter d'échapper au sauna, encore raté, le soleil tape très tôt sur ce versant est et j'arrive en nage à 7h40 au 1er col (Colle del Termo) à 2350m ! Le sentier de montée est caillouteux mais aisé à suivre. La descente est tout à l'ombre à cette heure là, un vrai bonheur : d'abord une sente minuscule dans l'herbe haute sur la moitié supérieure, puis un magnifique chemin moelleux en forêt sur le reste, avec un gradient idéal doux...cette descente finale est sans doute la portion la plus roulante (pour ne pas dire la seule...) des 4 jours, j'y croiserai d'ailleurs uniquement des traileurs !
Le Tagliaferro (2964m)
J'arrive à Rima vers 9h, bingo, le seul bar vient de recevoir des viennoiseries toutes chaudes...je me retiens pour en laisser aux autres...Rima fait partie de ces villages Walser magnifiques du Val Sesia, avec ses maisons typiques dont le 1er étage est en pierre et le second en bois. Les vastes balcons entourés de poutres permettaient le séchage du foin - une technique que l'on retrouve aussi dans le Queyras.
Rima
S'ensuit une montée tranquille et torride en 1h35 au Colle del Mud 2325m, j'ai étonnamment de bonnes jambes ce matin (comme quoi 1kg de polenta ça recharge bien les batteries). C'est la grande foule du samedi, je croiserai près de 10 personnes en 1000m de montée, sympas et bavards comme seuls savent l'être les randonneurs italiens. Ils font presque tous l'aller-retour au col et ont un peu de mal à comprendre comment j'ai pu venir de Berne en TP pour finir à Macugnaga avant de rentrer chez moi. Grâce à cette grosse fréquentation le sentier est assez correct dans l'ensemble...ce qui n'est hélas pas le cas de la descente sur Alagna : je n'y croiserai que 2 familles en 1200m (parents indignes !), le chemin est à nouveau assez destroy, envahi à pas mal d'endroits par les hautes herbes. 5 tiques de plus au compteur le soir. Un peu ras le bol, j'avoue. Je mettrai près d'1h30 pour descendre moins de 1200m, soit pas beaucoup moins que les panneaux...
Montée au Col di Mud : Alpe Vorco (2075m)
Dans la descente du Mud. Qui a vu la balise ?
J'arrive vers 12h45 à Alagna, ce gros village touristique est assez chouette mais plutôt calme et pas bien grand, j'ai l'impression que cela vit surtout du free-ride en hiver (les remontées culminent à 3200m et donnent un accès commode à tous les 4000 faciles du sud du Mont Rose). Pour le reste plein de magnifiques demeures Walser mais peu de boutiques, peu de restos, peu d'hôtels...rien à voir avec Zermatt ou Grindelwald ! Pour finir y'a pas que les glaciers de montagne qui disparaissent, ceux qui servent des glaces semblent également mal en point, je n'en trouverai qu'un seul - et encore bien caché !
Alagna
Détails trace GPX ici
Dimanche 19/06, Alagna - Macugnaga : 26.5k, +1800m, -1670m, 6h net.
Grasse matinée puisqu'il est inutile d'arriver trop tôt à Macugnaga avec le seul bus de la journée à 16h30. Donc départ tranquille à 6h45, je suis un court moment un couple de trailers locaux adorables mais un peu rapides pour moi...(bon ils avaient fait les 110km de l'Eigertrail !). L'idée était de bavarder un peu mais comme il n'y avait qu'eux capables de parler j'ai vite lâché l'affaire. D'ailleurs les seules personnes montant au col étaient tous en trail...sont fous ces Italiens...
Le versant sud du Mont Rose. Tout à droite la Punta Marguerita et la fameuse Cresta Signal
Alpe Mittletail, dans la montée au Col del Turlo.
Montée au Colle del Turlo - le grand luxe !
J'ai laissé la GTA filer vers le Val d'Aoste, de fait la montée au Colle del Turlo (2740m) est longue et douce sur une sorte de voie romaine dallée pas désagréable. Je partage la solitude du col avec une marmotte peu farouche visiblement habituée des lieux et des miettes de pique-nique. Le début de la descente est presque roulant jusqu'au Bivacco Lanti à 2125m sur cette belle mulattiera dallée qui trace de grands lacets au milieu des pierriers (les névés usuels de début de saison ont déjà tous disparu). Je croise à nouveau le randonneur aperçu le 1er soir a Campello, qui avait réussi à traverser sur Molini non sans mal...mais bon ils ont l'habitude des chemins qui n'existent que sur la carte ici ! Pas étonnant que les traileurs italiens fassent partie du gratin mondial.
Colle del Turlo (2740m) - light et pourtant pas bien fast :-(
Evidemment il ne fallait pas rêver, la suite est à nouveau bien laborieuse sur un sentier disjoint où n'ont subsisté que les petites pierres saillantes entre lesquelles l'herbe tente de reprendre ses droits. On rejoint le torrent principal vers 1500m, le chemin reste défoncé et tord-pattes jusqu'au bout mais il y a aussi de magnifiques vasques pour se tremper les pieds. Pas mal de promeneurs sont d'ailleurs montés dans ce but en ce dimanche étouffant, on se croirait presque au bord de la Verzasca...Au final je mettrai autant de temps à descendre du col à Macugnaga qu'à y monter depuis Alagna !
Verzasca ? Non, Quarazza !
C'est avec bonheur que je retrouve la piste carrossable (et la grande foule !) au Lago delle Fate, les 3 derniers kms jusqu'à Macugnaga sont rapides et roulants et permettent enfin de lâcher les chevaux et de se prendre pour un trailer. Le village est plutôt calme, une petite épicerie de terroir permet d'acheter un casse-croute gouteux. Là encore le seul glacier est bien caché, peu achalandé, et fermé jusqu'à 15h (tuyau : il y en a en fait un vrai et beau à Pecetto, 1.5km plus haut, juste devant le départ du car !). Je tue le temps au grand cimetière abondamment pourvu en plaques mortuaires de tous les "caduti" sur les sommets du Mont Rose. Ca ne donne plus trop envie de refaire de l'alpinisme.
Le car est à presque à l'heure et assez fréquenté, c'est vrai que 5 € pour 1h20 c'est pas abusif...le train suivant pour Brig est par contre annulé, apparemment le conducteur n'a pas réussi à arriver à temps ! Bah c'est l'occasion d'une autre glace (une belle et grosse, enfin !) sur la Piazza del Mercato de Domodossola avant de rentrer enfin au bercail.
Bilan : une traversée superbe et sauvage mais pas sûr d'avoir envie de marcher 1 mois sur ce genre de sentiers pour suivre la GTA jusqu'à la mer...
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Tourengänger:
Bertrand
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