Pico Arrieiro (1818m), sea to summit depuis Funchal

Pour ceux qui aiment le vélo en montagne, ouvrir une carte de Madère est comme une immense invitation au rêve avec une foultitude de petites routes arpentant dans tous les sens un relief escarpé culminant à plus de 1800m. Pourtant, alors que Mallorca ou les Canaries regorgent de cyclistes au printemps, d'agences de voyages proposant des camps d'entrainement et de récits en ligne, on ne trouve quasiment pas la moindre information quant au vélo sur cette somptueuse ile justement baptisée "jardin de l'Atlantique. La raison en est pourtant toute simple : Madère présente sans doute l'une des plus fortes concentrations au monde de routes à très forte pente, il est pratiquement impossible de trouver un itinéraire majeur ne présentant pas des longues portions à 10%, 12% ou 15% (parfois bien plus...) le tout sur des dénivelés dépassant fréquemment les 1000m. L'ile ne présente de surcroît quasiment pas un mètre carré de plat - en dehors des bisses locaux (les célèbres levadas) et de l'aéroport (et encore celui-ci est construit sur pilotis entre mer et montagne).

Etant installés à Funchal en famille "3 génération" pour 10 jours de découverte en mode balade / rando, difficile pourtant de résister à la tentation d'aller explorer la route d'accès au 3ème sommet de l'ile, le Pico Arrieiro (1818m). Plein de variantes sont possibles en particulier sur la partie inférieure, les rares blogs en portugais décrivent parfois la directissime de la Rua do Comboio qui dépasse les 17% de moyenne (!) sur les 1ers 550m (!!) de dénivelé. Pour les enragés cela donne



Il y a heureusement aussi des alternatives moins radicales, l'itinéraire que je propose (cf trace GPX)  est sans doute le plus raisonnable pour des cyclotouristes vaillants mais vieillissants comme moi.

Si on n'a pas souhaité enregistrer son vélo en avion, l'excellente boutique Happy Bikes de Funchal loue de superbes vélos en carbone à < 9kg munis de développements adaptés à la région (36 x 34, je n'ai pas souvent utilisé autre chose...). Ils ont aussi des VTT et même des vélos électriques...mais pas sûr que les batteries tiennent les 1870m de montée...

Je pars donc de nuit à la frontale, histoire non seulement de garder la majeure partie de la journée pour du tourisme en famille mais aussi pour éviter le traffic en ce beau dimanche ensoleillé. De ce point de vue je m'étais fait du souci pour rien, sitôt sorti de l'agglomération (bon certes déjà à 600m d'altitude) les voitures sont extrèmement rares - et les motos quasi inexistantes même en milieu de journée. De façon générale, excepté les grands axes et la zone cotière (et encore), il y a excessivement peu de traffic motorisé sur l'ile, ce qui est plutôt surprenant quand on voit la quantité de maisons isolées et la densité de la population (300 habitants au km carré - sans les touristes !). Le goudron est en général de bonne qualité, moins qu'en Suisse certes, mais meilleur que sur nombre de routes italiennes. Après les choses peuvent être différentes en période normale : grâce au Covid, nous avons pu bénéficier d'une fréquentation touristique quasiment divisée par 5 selon les locaux.

La combinaison Rua 5 de Outubro - Estrada do Fundoa - Camacho de freiras est sans doute la moins raide au départ du bord de mer de Funchal, elle rejoint vers 300m d'altitude la terrible montée de Monte, la suite est en général à 11-12% (avec des rampes à 15%) mais il y a aussi des petites morceaux de plat; les choses se calment juste avant d'arriver au Col du Poiso (1410m) qui premet de basculer sur la cote nord (Faial/Santana). La route en cul de sac menant au sommet de l'Arrieiro 400m plus haut est tranquille dans sa 1ère moitié (plusieurs redescentes), à nouveau bien revèche sur les 2 derniers kms à 11% mais le radar du sommet est désormais en vue - et l'auberge sert d'excellentes patisseries !

Le panorama est évidemment tout à fait exceptionnel...J'ai mis un peu plus de 3h net. Avant de ranger le vélo dans la voiture de location garée sur le parking du sommet puis de prendre le volant pour promener le reste de la famille entre Ribeiro Frio et le Curral de Freitas. Il semblerait que la plupart préfèrent le contraire et se font monter en voiture pour descendre à vélo. Je dois être un peu spécial, allez comprendre.

Nous remonterons le lendemain matin à l'aube à l'Arrieiro, en taxi cette fois-ci, pour une longue traversée jusqu'au col de l'Encumeada à travers les plus hauts sommets de l'ile en mode pédestre. Le chauffeur mettra 25 mn...Je profiterai de mon beau vélo de location pour 2 autres balades solitaires les jours suivants :

- Faial - col du Poiso - Funchal : +1370m en moins de 15km...sachant que cela redescend au milieu...le tout dans un brouillard à couper au couteau.

- São Vicente - Encumeada : +1000m en 10km. Paysages à couper le souffle et quasiment pas une voiture, malgré le sympathique bistrôt du col.

Bon pour être honnête pas sûr que je serai encore capable de faire du vélo ici quand on reviendra périodiquement y chauffer nos vieux os à l'âge de la retraite. Mais peut-être aura-t'on inventé le vélo à assistance hydrogénée d'ici là ?